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(2017) Appareil 19.

Quand Kittler renouvelle la métaphysique

Jean-Louis Déotte

Kittler livre dans ses Cours berlinois de 1999, les Médias optiques, une remarquable histoire des médias optiques, depuis leur préhistoire (camera obscura, perspective) jusqu’à l’ordinateur qui absorbe les médias intermédiaires comme la lanterne magique, la photographie, le cinéma et la télévision. Il apporte beaucoup s’agissant de domaines très techniques comme la télévision. Il procède selon les principes d’un structuralisme strict, évacuant ainsi les grandes déterminations de la philosophie classique et moderne, en particulier l’opposition entre sujet et objet. Pour autant, toute métaphysique est-elle écartée ? Certes le modèle de la théorie de la communication élaborée par Shannon est radical, mais n’est-il pas tributaire in fine de la théorie aristotélicienne de la forme-matière (hylémorphisme), le contenant (médium) rendant raison du contenu (message) ? Par ailleurs, sa lecture de l’histoire de la technique est positiviste et téléologique, européocentrique, alors qu’il laisse une part importante au hasard dans sa description des inventions. Se référant au premier Foucault, il déclare vouloir donner toute son importance au corps, mais ce dernier est réduit aux deux organes sensoriels essentiels (vision, audition), interprétés à partir de la théorie de l’information. On pourrait dire que ce corps aurait bien besoin d’être innervé (Walter Benjamin) pour rendre compte de l’historicité de la réception, ou qu’une dimension esthétique devrait être mobilisée entre lui et les médias optiques.

Publication details

DOI: 10.4000/appareil.2543

Full citation:

Déotte, J. (2017). Quand Kittler renouvelle la métaphysique. Appareil 19, pp. n/a.

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