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(2022) Essais et communications sur le langage, Genève-Lausanne, sdvig press.

Les catégories grammaticales

Louis Hjelmslev

pp. 346-355

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Hjelmslev, L. (2022). Les catégories grammaticales, in Essais et communications sur le langage, Genève-Lausanne, sdvig press, pp. 346-355.

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11 Par « catégories grammaticales » il faut entendre tout ce qui est inclus dans la rubrique suivante : cas (ou les formes de rection : nominatif, accusatif, génitif, etc.), comparaison (les degrés : positif, comparatif, superlatif ; par exemple : bon, meilleur, le meilleur), nombre (singulier, pluriel, etc.), genre (masculin, féminin, etc.), article (un homme, l’homme), personne (1e, 2e personne, etc.), diathèse (forme active, passive), mode (indicatif, subjonctif), temps (présent, futur). Parmi les catégories grammaticales qui concernent le temps, il faut inclure celles que l’on appelle couramment dans les langues slaves aspect : on a là une catégorie de formes qui décrivent la manière dont une action verbale se déroule (ou plutôt la façon de considérer le déroulement de l’action) ; il peut y avoir, par exemple, une opposition entre une action conclue ou « ponctuelle » et une action illimitée (considérée en tant qu’illimitée) ou « durative ». Dans les langues slaves, cette opposition apparaît la plupart du temps avec la dérivation (le perfectif russe kupiť « acheter » au sens de « réussir à acheter » est une forme conclue, « ponctuelle », tandis que sa dérivation po-kupať « (aller à, être en train de) acheter » est illimitée ou « durative »). En français, on trouve une opposition de ce genre dans la conjugaison, notamment dans le passé simple en tant qu’opposé à l’imparfait. La manière dont une action se déroule est en principe indépendante du temps dans lequel elle a lieu. En effet, l’aspect et le temps sont nettement distincts dans certaines langues : darau « je fais » (présent imperfectif), pa-darau « je fais » (présent perfectif), darysiu « je ferai » (futur imperfectif), pa-darysiu « je ferai » (futur perfectif), etc. Mais même dans ce cas, on trouve tou|jours une certaine dépendance entre l’aspect et le temps (qu’il n’est pas possible de discuter davantage ici). Cette dépendance est tout à fait évidente dans plusieurs langues : en français, l’opposition d’aspect ne se trouve que dans les verbes au passé, et pas dans les formes du présent ou du futur. La langue russe présente cette caractéristique que n’importe quel verbe perfectif, quand on le transpose au présent de l’indicatif, prend la signification du futur : le présent indicatif de kupiť est kupľu, qui signifie « j’achèterai » (au sens de « je réussirai à acheter »). Cette énumération des catégories grammaticales n’est pas exhaustive, mais elle est quand même suffisante pour la compréhension de ce qui suit.

2On donnera ensuite une description générale concise de l’ensem|ble du domaine recouvert par ces catégories grammaticales ; avant de parvenir à en donner une formulation plus claire et cohérente, nous devrons nous contenter momentanément de la délimitation assez vague et de la forme imprécise que nous offre la grammaire traditionnelle.

3Il faut d’abord préciser que le domaine qui nous occupe n’est pas du ressort du plan de l’expression linguistique, mais du plan du contenu : il est évident que les « catégories grammaticales » sont des catégories du contenu et non de l’expression. On est en effet en présence d’une seule et même catégorie, même si elle est exprimée différemment dans chacune des langues existantes. Dans plusieurs langues européennes (anglais, allemand, français, grec, hongrois), l’article déterminatif est proclitique, tandis que dans d’autres (langues nordiques : mand-en ; roumain, bulgare et dialectes russes) il est enclitique, ce qui n’empêche pas de constater qu’il s’agit d’une même catégorie grammaticale, à savoir celle de l’article. Il est en effet possible de constater l’existence de cette catégorie indépendamment de son expression spécifique. À l’intérieur d’une même langue, la même catégorie grammaticale peut s’exprimer par différentes dési|nences dans chacune des déclinations ou conjugaisons (le danois n’a qu’un seul pluriel pour tous les mots, malgré les différentes dési|nences : sø-er, slette-r, land-e), et parfois également ou exclusivement par la modification d’un élément quelconque à l’intérieur du mot (apophonie, métaphonie : pluriel danois d-ø-t-r-e, g-æ-s). Dans certains cas, à l’intérieur d’une même langue, la même catégorie grammaticale peut être exprimée par un changement de désinence (sødsød-ere ; je parle – je parlerai). Dans d’autres cas, cette même catégorie peut être exprimée par différents radicaux : c’est le cas de la supplétion, qui peut être associée à un changement de désinence, comme dans le cas de god – bedre ; je vais – j’irai. Il en va de même pour les séries telles que geh-e – geh-st – geh-t et ich – du – er : elles manifestent les trois mêmes personnes et donc la même catégorie. En fait, le nombre des moyens par lesquels une catégorie du contenu peut être exprimée est illimité, alors même que l’identité de la catégorie en tant que telle ne fait aucun doute. L’opposition entre forme interrogative et forme assertive (opposition qui est évidem|ment du ressort de la catégorie grammaticale de mode) dans les langues d’Europe occidentale en est un exemple significatif : opposée à la forme assertive, la forme interrogative peut être exprimée par un pronom interrogatif bien distinct (hvem, hvor, etc.), par la disposition des mots dans un certain ordre ou tout simplement par la présence d’un ton spécifique (généralement ascendant). Quelques langues plus lointaines disposent d’une conjugaison interrogative spécifique opposée à l’assertive, de sorte que l’opposition y est exprimée par des désinences régulières : cf. le groenlandais nâlag|putit « tu obéis », nâlagpoq « il obéit », mais nâlagpit « obéis-tu ? », nâlagpa « obéit-il ? ». On retrouve cette dépendance dans l’oppo|sition entre forme négative et forme affirmative (qui est également une différence de mode) : dans certaines langues, la négation peut être exprimée par une particule négative déterminée (ikke, « non »). Dans d’autres, la conjugaison négative s’oppose à l’affirmative, com|me par exemple dans le groenlandais, où l’on trouve un mode affirmatif-assertif (nâlagputit, nâlagpoq, voir ci-desus), un mode affir|matif-interrogatif (nâlagpit, nâlagpa, voir ci-dessus), un mode négatif-assertif (nâlángilatit « tu n’obéis pas », nâlángilaq « il n’obéit pas ») et un mode négatif-interrogatif (nâlángila « n’obéit-il pas ? » ; on note un cas d’homophonie à la 2e personne : nâlángilatit signifie aussi « n’obéis-tu pas ? »).

4La grammaire traditionnelle a reconnu les catégories grammaticales sans tenir compte de leur différence d’expression. Par contre, la linguistique classique s’est à juste titre intéressée exclusivement au plan de l’expression linguistique ; c’est entre autres pour cette raison qu’on a essayé de subdiviser les langues en types. On en distingue généralement quatre :

51. un type agglutinant, dans lequel toutes les fonctions grammaticales (dérivations et flexions au sens large) s’expriment par des suffixes, c’est-à-dire des éléments qui s’ajoutent après la partie lexicale du mot, le radical. De la sorte, chaque fonction grammaticale est exprimée par un suffixe bien distinct : en turc, -lar- est la désinence du pluriel, -a la désinence du datif, -da celle du locatif (le cas de position dans le lieu), -dan celle de l’ablatif (le cas du lieu d’où l’on part). Par exemple, le mot kush, « un oiseau », devient au datif kush-a, au locatif kush-da, à l’ablatif kush-dan, au nominatif pluriel kush-lar, au datif pluriel kush-lar-a, au locatif pluriel kush-lar-da, et à l’ablatif pluriel kush-lar-dan ;

62. un type flexionnel, où la limite entre le radical et le suffixe n’est pas claire : chaque suffixe exprime souvent plusieurs fonctions grammaticales différentes en même temps ; de plus, le radical lui-même peut subir un changement dans la flexion. La plupart des langues d’Europe occidentale, notamment dans leurs formes les plus anciennes (par exemple, le latin), appartiennent à ce type ; dans le danois mand-en, par exemple, la désinence exprime en même temps la détermination (l’article) et le genre commun (donc le genre grammatical), sans qu’il soit possible de définir une frontière entre l’expression des différentes catégories grammaticales, contrairement à l’exemple du turc mentionné ci-dessus ;

73. un type polysynthétique (à insertion), dans lequel il n’y a aucune délimitation nette entre mot et phrase, et dans lequel toutes les fonctions grammaticales de la phrase peuvent s’exprimer par des adjonctions ou des transformations faites à un même radical. Des langues telles que le groenlandais et le basque appartiennent à ce type : par exemple, en basque dut « je l’ai », distut « je les ai », diot « je le lui ai … », dioza « je les leur ai … » ;

84. un type isolant, qui ne permet pas aux fonctions grammaticales de s’exprimer à travers la flexion (au sens large), mais plutôt par l’ordre des mots ou bien par l’adjonction d’un mot indépendant. Le pluriel, par exemple, peut être exprimé en ajoutant l’adjectif « plusieurs », tandis que le substantif lui-même ne change pas ; le présent peut être exprimé en ajoutant l’adverbe « maintenant », et ainsi de suite. L’exemple habituellement cité de ce type est le chinois classique ; cela n’est pas le cas du chinois parlé moderne.

9Ces types de langues ne se rencontrent presque jamais à l’état pur, et dans l’ensemble, aujourd’hui, on est d’accord de considérer cette classification comme insatisfaisante. L’objection principale est qu’une telle subdivision ne concerne que l’expression linguistique ; définie de cette façon, elle est relativement valable, bien que la question de l’existence des types linguistiques soit encore loin d’être réglée. On pourrait concevoir une typologie tout à fait différente, plus précise, qui soit en mesure de prendre également en compte le contenu linguistique, et qui propose une classification fondée sur la présence ou l’absence de certaines catégories grammaticales. Mais la typologie de la linguistique classique doit surtout son importance historique au fait qu’elle a montré que, tout d’abord, la formulation de ce genre de typologie est possible, et que cette dernière est par essence indépendante de la parenté génétique des langues : même si l’on peut affirmer qu’à l’origine notre famille linguistique, la famille indoeuropéenne, était flexionnelle, plusieurs de ses langues se sont transformées au cours de leur développement en un type tout à fait différent, sans cesser évidemment d’être indoeuropéennes. En armé|nien, qui est une langue indoeuropéenne génétiquement apparentée à la nôtre, on a eu agglutination pure : hay « un arménien », datif-génitif hay-u, instrumental hay-ov, ablatif hay-e, nominatif pluriel hay-er, datif-génitif pluriel hay-er-u, instrumental pluriel hay-er-ov, ablatif pluriel hay-er-e. Par rapport aux types linguistiques qu’on vient de mentionner, l’arménien est plus proche du turc avec lequel il n’est pas apparenté, que des langues indoeuropéennes de sa propre famille, comme le grec, le latin, le russe, etc. L’anglais moderne, qui est lui aussi une langue indoeuropéenne, est presque devenu une langue de type isolant et se retrouve pour cette raison plus proche du chinois que de son origine historique. Certains soutiennent qu’il en est de même pour le français moderne, mais d’autres affirment que cette langue est plutôt en train de devenir synthétique : dans je ne le lui ai pas (donné), aucun des éléments n’est un mot indépendant ; c’est l’expression dans son ensemble qui est au contraire un mot univoque et qui ressemble curieusement à l’exemple du basque men|tionné plus haut.

10Les catégories grammaticales peuvent donc devenir elles-mêmes des objets d’analyse si on ne considère pas les différences d’expres|sion qui ne sont pas accompagnées par des différences de contenu. Pour ce faire, il serait utile d’examiner leurs membres individuels avant de les analyser en tant que telles. Chacune des catégories listées au début de cette publication possède en effet un certain nombre de membres : ainsi, la catégorie des cas, par exemple, a des membres qui sont par exemple le nominatif, l’accusatif, le génitif, etc. (quelques exemples de membres ont été mis entre parenthèses après chaque catégorie correspondante). Ce qu’il y a de remarquable est le fait que, pour qu’on puisse parler de membre dans ce sens, il faut qu’il y en ait au moins deux ; en effet, établir une catégorie n’ayant qu’un seul membre n’a aucun sens : cela signifierait que la catégorie n’existe pas. De même, il est absurde de dire, par exemple, qu’une langue n’a qu’un genre ; il serait plus exact d’affirmer que cette langue n’en a aucun (comme c’est le cas pour le finnois ou le hongrois dans la plupart des mots, ou pour l’anglais). Il en va de même pour toutes les autres catégories. Les membres des catégories sont complémentaires : un membre ne peut pas exister sans l’autre : quand la catégorie est représentée, elle comporte toujours au moins deux membres.

11Les langues qui possèdent une catégorie grammaticale donnée peuvent du reste inclure dans cette même catégorie un nombre différent de membres. Le nombre de membres dans une catégorie doit être établi en considérant à la fois le contenu et l’expression. Les catégories dont il est question ici ne sont pas en effet des catégories éternelles de la pensée, existant indépendamment des langues, mais plutôt des signes linguistiques concrets. Étant donné qu’un signe linguistique résulte toujours de la connexion entre un contenu (un signifié) et une expression, on effectue un test d’échange de la façon suivante : si, suite à un échange réciproque, deux contenus significatifs donnés peuvent engendrer un échange correspondant sur le plan de l’expression, on reconnait deux membres différents de la catégorie, mais non autrement. Si, dans les langues de l’Europe occidentale, on remplace le contenu « il » par le contenu « elle », on engendre un échange sur le plan de l’expression entre les pronoms personnels (et, selon la structure de la langue choisie, c’est aussi le cas pour d’autres noms) : cf. français il – elle, anglais he – she, etc. En finnois, au contraire, « il » et « elle » se disent indifféremment hän, et l’échange sur le plan du contenu n’engendre aucun échange correspondant sur le plan de l’expression : par conséquent, les deux membres ne sont pas distingués en finnois. Il en va de même pour le hongrois. Le test d’échange est crucial, puisqu’il est le seul moyen d’établir si une langue possède ou pas les membres en question. Si l’on ne disposait pas de ce test, on n’obtient que des classifications purement logiques, non linguistiques, ou bien une transposition des classifications d’une langue à l’autre. La raison pour laquelle, dans le passé, le modèle de la grammaire latine a été transposé aux gram|maires des langues modernes, c’est précisément que le test d’échange n’était pas respecté.

12Le test de l’échange permet de dresser un inventaire des membres de chaque catégorie dans toutes les langues. Par-là, on est en mesure de montrer qu’il est possible de subdiviser la zone conceptuelle associée à chaque catégorie d’une façon différente selon la langue étudiée. Dans les langues bantoues d’Afrique, le système du genre est particulièrement développé, il contient jusqu’à seize membres, tandis que les langues européennes en possèdent beaucoup moins : le plus souvent quatre (comme dans le danois : han, hun, den, det), trois (en allemand, par exemple), deux (substantif, adjectif et pronom personnel en français), ou même aucun (le finnois et le hongrois n’ont qu’une distinction de genre dans le pronom interrogatif, étant donné qu’il y a une différence entre « qui » et « quoi »). Les langues les plus connues possèdent deux nombres, mais en lituanien et en grec ancien, cette zone conceptuelle est subdivisée d’une façon différente ; en effet, outre le pluriel et le singulier, on y trouve le duel : ceci recouvre la partie de la zone sémantique qui dans les autres langues est normalement englobée à l’intérieur du pluriel. Certaines langues de l’Océan Pacifique ont même une forme de flexion pour le triel et pour le quadriel. L’allemand et l’anglais ont trois degrés de comparaison, tandis que le français n’en a que deux (le concept de superlatif est transféré au comparatif déterminé, et donc à une superposition entre la catégorie de comparaison et la catégorie de l’article) ; le danois en a quatre (aller-), ainsi que le hongrois. Le temps et le mode peuvent eux aussi avoir un nombre de membres assez différent : le danois a trois modes (indicatif lives, impératif-subjonctif-infinitif live), tandis que l’allemand distingue le subjonctif de l’infinitif. La catégorie des cas peut être réduite à un minimum de trois membres (et même à deux d’après certains postulats), et s’élever jusqu’à plus de cinquante membres (cf. les langues caucasiennes).

13On peut donc définir les membres par le test d’échange. Selon celui-ci, il faut que n’importe quel échange d’expression, pouvant d’ailleurs varier d’un type de flexion à l’autre, puisse s’appliquer entre deux membres. L’échange de l’expression peut consister en un échange entre une désinence et un suffixe 0 (souvent au nominatif, au singulier, à l’impératif) : en danois par exemple, il existe dans la catégorie de l’article un membre exprimé par une désinence zéro, à savoir une forme mand opposée à en mand et à mand-en, ce qui porte à trois le nombre de membres de la catégorie. Il est par ailleurs également important de noter que deux membres peuvent fusionner sous certaines conditions. Cela veut dire que leur échange est neutralisé, comme c’est le cas en allemand entre le nominatif et l’accusatif dans le neutre, ou en anglais, entre les trois personnes dans le pluriel du verbe (are), etc. Par l’échange et sa neutralisation dans certaines circonstances, les membres sont définis à partir de leur fonction grammaticale, ce qui constitue une base plus solide que la simple distinction sémantique, même si cette dernière en est un complément important.

14Il ne faut pas non plus définir exclusivement ni principalement les catégories sur la base de leur signification, mais à partir de leur fonction grammaticale. En effet, la majeure partie de l’imprécision des grammaires classiques vient du fait que, dans le passé, on ne donnait pas suffisamment d’importance à cette fonction. Les faits de rection se révèlent ici décisifs. Une distinction est faite entre les catégories dont tous ou une partie des membres peuvent être régis – il s’agira donc des catégories de flexion proprement dites – et les catégories dont les membres peuvent être régissants (catégories appelées aussi « converties »). Une catégorie de flexion et une catégorie convertie (dont, normalement, l’inventaire des membres est différent) peuvent recouvrir une seule et même zone séman|tique : par exemple, les catégories de personne et de genre sont souvent converties dans le pronom personnel de sorte qu’en danois les pronoms han (« il ») et hun (« elle ») ne servent qu’à indiquer le genre et la personne, tout en manquant d’un contenu lexical proprement dit ; en effet, le contenu de ce mot est identique au contenu des formes flexionnelles. D’autre part, le cas peut se convertir dans les prépositions. Chaque catégorie est donc définie en tant que nominale ou verbale, selon que la rection correspondante se limite à une même phrase (comme pour la catégorie des cas) ou s’étend au-delà de la phrase (comme pour la catégorie du mode).

15Vues sous cet angle, les langues se montrent singulièrement semblables, malgré leurs différences extérieures : au cours des analyses, les mêmes catégories reviennent avec une régularité monotone. Certaines peuvent bien sûr être absentes dans une langue : la comparaison flexionnelle peut y manquer, tout comme la catégorie de genre (complètement ou en partie), ou encore, comme c’est souvent le cas, la catégorie de l’article, comme par exemple dans la langue nationale russe. L’inventaire des catégories peut se réduire à un minimum : dans ce cas, la seule catégorie flexionnelle définie par la rection qui reste sera celle qui marque les membres de la phrase (sujet, objet, prédicat) à travers l’ordre des mots. Si l’on se base sur ces définitions, on peut préciser qu’il s’agit de la catégorie de cas, même si la grammaire classique ne serait pas de cet avis. Le chinois classique en est un exemple. Le nombre des membres d’une catégorie ne peut pas être inférieur à deux, tandis que le nombre des catégories peut tout à fait se limiter à un seul : en effet, les membres sont complémentaires, tandis que les catégories sont autonomes.

16Pour les catégories grammaticales, ainsi que pour leurs membres, il est possible de formuler une nouvelle typologie linguistique qui est, tout comme l’ancienne, indépendante de la parenté génétique des langues. Mais cette tâche est loin d’être accomplie et nécessitera encore un énorme travail préparatoire.

    Notes

  • 1 [« De grammatiske kategorier », Translatøren, 3, 1 (1941) : 8-16].

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